En Argentine, on assiste à la (ré)apparition de peuples sur la scène politique. Après que l’Etat ait tenté d’essentialiser leurs différences afin de les mener vers la « civilisation », ce sont maintenant les leaders autochtones qui pratiquent l’auto-essentialisation pour revendiquer des droits.
Paper long abstract:
Dans un contexte d'internationalisation des mouvements autochtones et d'articulation politique entre des peuples très divers durant les vingt dernières années, de nouveaux discours et acteurs sont apparus sur la scène internationale pour y revendiquer des droits particuliers au nom des différences culturelles. Dans la foulée, on assiste aujourd'hui, en Argentine, à la (ré)apparition de peuples qui avaient jusque alors été considérées comme disparus (Huarpe, Ona, Quilmes) ou en voie de disparition, après près d'un siècle durant lequel l'idéologie républicaine avait tenté d'occulter la présence autochtone sur le territoire national. Sur la base de l'exemple mapuche de Patagonie, je montrerai qu'il est cependant frappant de constater que les communautés rurales sont présentées comme correspondant au « vrai » mode de vie « authentiquement » mapuche alors même que le 70% de la population mapuche vit à l'extérieur des communautés. Cette représentation très partielle de la réalité mapuche contribue à la formation et à la diffusion d'une image idéalisée et romantique de la vie communautaire. Image qui fut d'abord diffusée par les autorités étatiques pour témoigner de la rusticité et des différences culturelles d'un peuple qu'il fallait impérativement « civiliser » mais qui est aussi reprise actuellement par les leaders du mouvement mapuche pour revendiquer des droits particuliers dans un processus d'auto-essentialisation auquel les anthropologues ne peuvent rester insensibles.